Gucci croisière par Alessandro Michele : Le goût du bel anachronisme
Critiques

Les défilés croisières sont désormais, l’apanage des grandes Maisons. Gucci ne pouvait donc pas échapper à la règle. C’est dans les années 1990 que la marque renoue avec son empreinte originelle à savoir, une mode éclatante voire criarde, mais jamais vulgaire, une accumulation d’influences toutes plus diverses pour une silhouette finalement, au tournant des années 2015-2020, assez pointue, voire intello. Mais se revendiquant d’une intellectualité différente que celle des adeptes des minimalismes d’alors du type de Yamamoto, ou encore d’aujourd’hui, de Margiela & l’Arte povera.

Ce défilé croisière, idéal pour les clientes, permettant de faire le pont entre les sempiternelles collections automne/ hiver & printemps/ été, réuni en quelques passages tout l’ADN de la Maison Gucci : un esprit baroque, second degré, dans une opulence d’artefacts. Après le passage retentissant de Tom Ford dans les 1990, c’est aujourd’hui Alessandro Michele qui se retrouve à la tête de la direction artistique et cela depuis 2015.

Fondée en 1921, la marque Gucci fait toujours tout fabriquer en Italie. A l’origine spécialisée en maroquinerie de luxe, l’ADN de la Maison se développe autour du domaine équestre ; le mors et l’étrier en deviennent l’emblème. Très vite, et dès 1930, la marque se diversifie dans les chaussures, gants, caleçons (…) et survit aux pénuries de matières premières de la période fasciste en diversifiant ses matériaux. C’est à cela que l’on doit le sac « Bamboo », doté d’une anse en bambou et d’un cuir de sanglier.

Les produits Gucci sont des créations qui se veulent intemporelles et éternelles. Gucci tâche saison après saison d’incarner le bon goût, partageant avec Vuitton ou encore Hermès l’univers élitiste de l’équestre. Pour autant, les années Tom Ford ont laissé une empreinte indéniable et célébré une femme sexy avec peu de subtilité et beaucoup de subversion.

Ainsi, la question que tous se pose dorénavant est de savoir si la silhouette proposée par Michele renoue avec cette volonté d’élégance et de raffinement, où est-ce qu’à l’instar d’un Tom Ford Michele fait de sa collection le manifeste d’un certain état des genres sexués ? L’adjectif « pop » issu de « popular », utilisé par le présent designer pour décrire son travail, s’applique-t-il à cette collection ?

Défilant dans la Galerie Palatine, au sein du Palais Pitti, la collection Cruise 2018 d’Alessandro Michele s’inspire de la Renaissance italienne. C’est la première fois qu’un défilé de mode se tient dans ce lieu, qui pour l’occasion recevra plus de 2 millions d’euros de la part de Gucci pour la restauration des jardins, et on ne peut que l’en féliciter au regard de la situation économique de l’Italie actuelle (…)

Cet attrait de la marque pour des lieux emblématiques de la culture ne date pas de ce show : en effet Gucci a déjà collaboré avec le Palais Strozzi à Florence, le Micheng Art Museum de Shanghai, la Chatsworth House en Angleterre et le LACMA à Los Angeles. Rien que l’année dernière, la Maison a révélé sa collection croisière dans le Cloître de l’abbaye de Westminster. Cette volonté de s’ancrer saison après saison dans des lieux emblématiques de la culture ne fait que confirmer ces liens devenant de plus en plus étroit entre l’art et la mode.

Michele, backstage, se livrant sur la collection, confiait que d’après lui, « le tout début de l’esthétique européenne a commencé à Florence », ce à quoi on pourrait bien entendu lui rétorquer que l’art florentin Renaissant tient pour beaucoup à l’époque Hellénistique… De cette vision quelque peu fantasmée de Florence on retiendra qu’il demeure effectivement quelque chose de propre à l’antique, considéré aujourd’hui comme classique des classiques. Mais à oser la comparaison entre la Napa Valley et Florence comme il le fait, nous n’irions sans doute pas jusque-là… On imagine que l’enthousiasme de la création prenant forme l’a sans doute dépassé (…)

“Dans cet endroit ce n’est pas le passé que l’on doit voir, mais plutôt la Napa Valley d’aujourd’hui, et son effervescence créative.” Michele.

Le Palais Pitti où s’est donc tenu le show, a cela de particulier qu’il illustre parfaitement le passage du Moyen Âge à la Renaissance. En effet, au cours du Moyen-âge, les châteaux étaient d’austères bâtisses édifiées pour l’autodéfense d’un territoire ou d’un pays et la protection de la population environnante. Une fois la guerre de cent ans enterrée, on passe, au siècle suivant, au règne des châteaux-palais, moins utilitaires, mais plus esthétiques, dévoilant d’une façon toute autre la richesse et donc la puissance de leurs propriétaires. C’est là que l’on peut voir un parallèle avec ces vêtements conçus non plus pour le confort mais pour l’esthétique pure, l’ornementation, le commentaire sur soi aux autres, au monde.

Retournons au défilé. L’ambition première d’Alessandro Michele était de faire le défilé au Parthénon athénien : « au commencement tout a commencé autour de la Méditerranée, les cultures grecques comme romaines. » Ne pouvant pas avoir Athènes, c’est vers Florence qu’il s’est tourné, la ville où l’argent et le pouvoir étaient réunis. Son style décalé et maximaliste ne pouvait trouver meilleur écrin que le Palais Pitti florentin, où la collection – inspirée de la Renaissance italienne – trouve le ton juste entre broderies, perles et ornementations multiples, et rappels fréquents à la modernité dans laquelle s’inscrit son travail : soit polos WASP, blouson aviateur début de siècle, couleurs blocks, imprimés 1960’s  (…)

Au cours de la Renaissance, les vêtements sont souvent en velours ou en soie, matériau noble et coûteux. Les hommes de la haute société portent des collants et des fraises, le baroque donnent le ton au costume. Entre 1625 et 1670, le costume use d’imagination et de virtuosité : absence de mesure, recherche de mouvement, d’opposition, de liberté. Ainsi on évite la froide retenue réformiste et celle de la Contre-Réforme : on puise dans la profusion de détails, dans l’outrance qui ira jusqu’à la préciosité, à l’instar de Michele qui prend le parti de l’abondance.

La symétrie et l’équilibre ne sont plus de mise, ni alors, ni avec Michele, qui entremêle les vestiaires féminin et masculin, use et abuse des couleurs en faisant fît de leurs possibles complémentarités, et n’hésite pas à associer à des matières nobles autres joggings de coton. L’anachronisme fait autorité et suggère une forme de liberté de ton propre au fouillis.

« J’aime la culture populaire, c’est la raison pour laquelle j’apprécie tout particulièrement la Renaissance, qui est à mon sens très pop. « Pop » cela signifie que c’est compris par tous. » Michele.

C’est à cela, au baroque, que la silhouette Gucci doit son éclectisme, riche d’un syncrétisme propre à celui qui voyage, s’instruit et s’imprègne. Les Européens de la Renaissance eux, n’avaient pas pleinement conscience de leur identité culturelle. Selon l’historien anglais John Hale, ce fut à cette époque que le mot Europe entra dans le langage courant et fut doté d’un cadre de référence solidement appuyé par des cartes et d’un ensemble d’images affirmant son identité visuelle et culturelle.

Elément crucial lorsqu’on s’aperçoit qu’aujourd’hui, on peut s’habiller de la même façon à Londres comme à Milan. L’identité culturelle d’aujourd’hui en Europe ce sont des siècles d’histoire homogénéisés par des modes de vie qui s’interpénètrent et s’assimilent du nord au sud, de l’ouest à l’est, par les moyens de communication qui sont les nôtres.

Là où l’on pourrait frôler le mauvais goût, Alessandro a eu l’ingéniosité de prendre du recul quant à cette multiplicité de références toutes plus conséquentes les unes que les autres ; ainsi, si la collection dans son ensemble peut paraître légitimement fouillie, en réalité elle permet de remettre en question l’idée de goût : si l’on est à la limite de ce qu’un tel qualifierait de mauvais goût, c’est notamment pour amener le regardeur à s’interroger : le moins est-il le mieux, le rare est-il toujours beau ? Quelles références sont les miennes ? Pourquoi porter aujourd’hui ce que j’ai détesté hier ?

Nous sommes certainement au moins autant les légataires d’une histoire du vêtement et de ses codes, que ceux qui imposent et revendiquent une nouvelle manière d’appréhender notre époque. Le style d’Alessandro Michele se ressent dès l’arrivée des premières silhouettes, masculines et féminines, toujours ultra-colorées (bleu, vert, orange, rouge, violet) et riches en motifs, broderies, et autres décorations. Le directeur artistique de la maison joue la carte des mélanges : genres, matières, imprimés ou ornements. La collection relie les débuts de Gucci à l’histoire de la ville. Renommée pour sa délicatesse, la dentelle est l’emblème de la mode à la Renaissance. Cette veste en dentelle conçue par Michele rebrodée de fleurs et de feuilles rend hommage au passé tout en affichant des lignes contemporaines.

Le designer continue d’explorer la faune et la flore qu’il a fait siennes – roses roses, sur des robes plissées, poissons (symboles christiques?) sur tee-shirt on ne peut plus basique… Le chanteur Francesco Bianconi a défilé en costume avec un imprimé de tapisserie orné de roses rouges. L’excentricité est de mise : pantalon de jogging 1990’s porté avec une chemise à volants,  manteau matelassé bordeaux,  imprimé dragon sur col de veste rouge – Chinatown dans les 1980’s. L’excentricité, selon Michele, n’est pas un accident mais une façon de s’approprier une époque et d’exprimer une individualité, ce à quoi on pourrait ajouter de ne pas se laisser enfermer dans une tendance, un style, mais de les épouser toutes, se démarquant par ce biais de la mass mode.

Côté pièces, la maison propose de nombreuses robes fluides, longues et colorées, semblant avoir été conçues pour des déesses, mais aussi des robes en brocart ou en mousseline de soie, qui contrastent avec les mini shorts en denim ornés de motifs, les robes en cuir, ou encore les joggings iridescents. Des styles qui se complètent finalement plus qu’ils ne s’affrontent comme le montre un ensemble composé d’un jogging vintage surmonté d’un long manteau matelassé rose. On retrouve également le Logo GG utilisé pour la première fois dans les années 70. La collection Cruise 2018 rend hommage aux origines de Gucci en réintroduisant ce motif GG dans le prêt-à-porter, qui contraste avec un fond arc-en-ciel en harmonie avec la nouvelle esthétique de la Maison, et appuie cette atmosphère d’intemporalité.

Les pièces sont marquées de l’estampille Renaissance, de cette inspiration au cœur de la création du designer : la cape en fourrure de vison marron – pour ne citer qu’elle – présente dans sa doublure en soie à imprimé rose une broderie « Venere », en référence à la déesse romaine Vénus. La palette est vive et dynamique, avec un accent porté sur le rose encore (décliné en plusieurs harmonies) et l’or, bien sûr, très présent.

Côté détails, on retrouve beaucoup de nœuds, comme autant de citations et d’emprunts aux époques passées à décoder, sur le prêt-à-porter mais aussi sur les accessoires, et des fleurs, faisant écho aux motifs de la collection. Les couvre-chefs sont aussi présentés en nombre, plus excentriques que jamais, comme ces couronnes de lauriers qui viennent habiller la tête des mannequins, ou encore ces cagoules entièrement recouvertes de perles. Certains modèles défilent d’ailleurs avec des colliers de perles qui entourent non pas leur cou mais leur visage.

« Je pensais injecter du rock ‘n’ roll dans la collection, en pensant à des visages comme [Simonetta] Vespucci (muse de Botticelli, que l’on peut voir sur la toile des quatre saisons). Elle était rock’n’roll à l’époque. » Un modèle portait ses cheveux à la manière de Vénus (peinte par Botticelli), des perles et des couronnes de laurier très fines encadraient les visages des modèles alors qu’elles entraient, vêtus de robe courte en brocart avec un col roulé ou une robe en mousseline de soie plissée dans différentes nuances de rose. « J’aime le rose, c’est très puissant. Cela te fait te sentir douce et sexy, même si tu es un homme ». Michele

Les vestiges de l’ancien thème classique, ces couronnes dorées, ces diadèmes en argent au motif de lyres, les turbans léopard, foulards, bandeaux laineux, côtoient autres lunettes teintées quelque peu ringardes dirait-on aujourd’hui, les perles tissées dans les tresses de cheveux, un hommage certain à la perle irrégulière du baroque. L’œil italianisant de Michele pour l’excès et l’extravagance rôde sans entrave à travers les siècles, des impressions psychédéliques sur tailleurs aux robes de chambre Renaissance devenues seventies.

Cette saison, il y avait également des collants pailletés et imprimés au logo GG, des chaussettes, sur lesquelles on pouvait voir des impressions de tête de loup, motif spirituel repris par certains bikers américains aux tribus indiennes et donc repris par Michele ici. Sans compter ces slogans Guccy, Guccification, et Guccifiez-vous. A l’image du logo omniprésent, tout sauf discret, et filé sur des jupes midi, des pantalons pour hommes, ainsi que des bombers et des fourrures, faisant office de véritables « hiéroglyphes, pop symboles » dans l’esprit de Michele. L’ambition de la Maison est donc de « Gucchifier ». Il y a la volonté de jouer avec les codes, de faire de reprises de reprises et de l’auto-parodie, consciente.

Ce qui empêche de tomber dans une lecture premier degré est l’étrangeté sous-jacente: il y a quelque chose d’inquiétant dans ces silhouettes qui défilent. Teints grisés, œil vide, ils ressemblent à s’y méprendre à ces hommes robotisés que l’on voit dans le film « Bienvenu à Gattaca ». Peut-être n’y a-t-il pas de grandes profondeurs politiques, mais il y a un sous-texte que le public n’a pas vu, car ils étaient littéralement assis dessus. Michele avait les lignes de « A Song For Bacchus », un poème écrit au 15ème siècle par Lorenzo de Medici, brodé sur les sièges sur lesquelles ils étaient assis :

Chants de Carnaval de Lorenzo de’ Medici

Combien belle est la jeunesse : Elle ne cesse de fuir.

Qu’à son gré chacun soit en liesse, Rien n’est moins sûr que demain.

C’est Bacchus et Ariane, Beaux et brûlants l’un pour l’autre : Leur bonheur est d’être ensemble, Car le temps s’enfuit, trompeur.

Ces nymphes et tout le monde Ne cessent d’être en gaîté. Qu’à son gré chacun soit en liesse, Rien n’est moins sûr que demain.

Il s’agit donc de célébrer la vie, et les vies, de ces hommes et ces femmes qui nous ont précédés, et dont on hérite une part de notre culture, avant que l’on disparaisse à notre tour. Là est sans doute puisé ce caractère orgiaque, cette volonté de tout voir tout faire tout porter avant d’être emporté. Inspiré par le Carnaval de Florence où il a l’habitude de se rendre, Laurent de Médicis sacrifiait bien volontiers tout lyrisme au ton enjoué de la plupart de ces ballades. Ici, on peut lire un hymne à la vie : il compose d’abord dans le style comico-réaliste, parodique et caricatural, faisant écho au fouillis de Michele.

Avec cet aphorisme, inspiré de Médicis, Alessandro Michele a résumé sa collection croisière Gucci, présentée lundi soir à la galerie Palatine du Palais Pitti, qui, bien sûr, combinait des éléments chers au designer – ses riches broderies et décorations, ainsi que cette opulence, tant dans les couleurs que dans les matériaux, cette profusion de codes que l’on retrouve exemplifiée sur Elton John, l’un de ses invités de premier rang, qui portait une veste sombre mais pailletée. Pailletée et munie d’une broderie de lézard multicolore sur l’un des bras, le lézard étant le dérivé du serpent dans la symbolique aztèque, qui a la particularité d’être considéré comme un ami de la maison, on aura compris que certains invités répondent au designer.

Pour finir, les chanceux qui étaient invités au défilé ont eu la surprise de repartir avec une boîte conçue comme un souvenir de Florence, une boîte sur laquelle était estampillée des feuilles d’orties, accompagnée d’un chapeau de la marque dans un sac de jute : « C’est une belle boîte, mais vous ne savez pas si c’est un poison, un médicament ou un parfum. Cela vient de Nouvelle-Zélande, et c’était ce qu’il y avait de plus exotique à porter à la Renaissance. C’était très rare, mais à cette époque, vous pouviez le trouver à Florence, ce qui ne manque pas d’illustrer la richesse de cette époque. »

C’est au sein de la sublime Galerie Palatine du Palais Pitti qu’Alessandro Michele avait choisi de faire défiler sa collection croisière 2018. Les différentes silhouettes Gucci témoignent une fois de plus de la folie créative du directeur artistique de la maison qui parvient malgré le tourbillon de matières, de couleurs et d’influences à conférer à la collection une harmonie baroque, donc irrégulière mais non moins exigeante.

Quoi qu’il en soit, il convient de relever qu’Alessandro, avec l’aide de son PDG Marco Bizzari, a su faire preuve d’habileté quand il a s’agit de marquer un retour définitif à l’artisanat italien, allant jusqu’à créer des coopératives ouvrières spécialisées en maroquinerie. Sous l’impulsion d’Alessandro Michele, directeur artistique, Gucci a redéfini le luxe de sa Maison tout en renforçant sa position parmi les maisons de couture les plus convoitées au monde, s’inspirant sans doute des « petites mains » que l’on retrouve chez LVMH et chez Chanel. Le cadre a pu aider, même si l’idée d’un défilé en plein hangar aurait pu également s’y prêter, tant il fait sens.

Tant en termes de confection, que de sens donné à la collection, Michele a su capter l’esprit de son temps, qui n’a guère plus envie d’être encastré dans un style, un mouvement, mais de les embrasser tous, dans une harmonie hétéroclite. Si à première vue les silhouettes apparaissent un peu fouillies dans les termes, foutraque dans le sens qu’on peut lui conférer, en y réfléchissant un peu plus, on s’aperçoit qu’elle représente la quintessence de notre époque : une profusion difficile à maîtriser, riche de symboles et de codes qu’un spécialiste seul peut déchiffrer tant le tout est intellectualisant à outrance.

Pas vraiment populaire, mais pop au sens de polyphonique, polysémique et exaltant. Hommes et femmes défilent ensembles, et la femme n’est plus l’avatar – ou du moins le seul avatar – de ce que l’on mitraille du regard et objectise. Féminin et masculin sont encore un peu moins des genres en couture, mais davantage des problématiques de mesures : largeur d’épaule, courbure de la veste. En somme, il nous a été présenté un débordement maitrisé, une harmonie convaincante, desquelles s’exhalait une appétence pour le bel anachronisme.

The taste of beautiful anachronism

 

Cruises shows are now the prerogative of Maisons de couture. Gucci does not want to step down. It’s in the 1990s that the brand returns to its original imprint, a dazzling fashion, but never vulgar, an accumulation of all kinds influences, at the turn of the years 2015-2020, quite sharped, even intellectual. But claiming an intellectual difference as followers of minimalism like Yamamotos, or today Margiela.

This cruise show, ideal for customers, to bridge the autumn/winter & spring/summer collections, gathered in few passages all the DNA of the Gucci House : a baroque spirit, second degree, with opulent artefacts. After the resounding passage of Tom Ford in the 1990s, it’s now Alessandro Michele who has been at the head of the artistic direction since 2015.

Founded in 1921, the Gucci brand still manufactured everything in Italy. At the origin of luxury leather goods, the DNA of the House develops itself around the equestrian world ; bit and stirrup become emblems. Very quickly, and as early as 1930, the brand diversified into shoes, gloves, underpants (…) and survived the shortages of raw materials of the fascist period by diversifying its materials. This is what we owe the « Bamboo » bag, with a bamboo handle and boar leather.

Gucci products are creations that focuses on being timeless and eternal. Gucci’s task season after season is to embody good taste, sharing with Vuitton or Prada the elitist world of equestrianism. However, Tom Ford years have left an undeniable impression and celebrated a sexy woman with few subtlety and a lot of subversion.

Thus, the question that all raises is to know if the silhouette proposed by Michele renews with this will of elegance and refinement, or if itis like in Tom Ford years, a manifesto of a certain state of gender? Does the adjective « pop » of « popular » apply to this collection?

Strolling through the Palatine Gallery in the Pitti Palace, Alessandro Michele’s Cruise 2018 collection is inspired by the Italian Renaissance. This is the first time that a fashion show is being held in this place, which for the occasion will receive more than 2 million euros from Gucci for the restoration of gardens, that we can only congratulate in view of the economic situation in Italy today (…)

This attraction of the brand for emblematic places of culture does not date from this show: in fact Gucci has already collaborated with the Strozzi Palace in Florence, the Micheng Art Museum in Shanghai, Chatsworth House in England and LACMA in Los Angeles. Just last year, the House revealed its cruising collection in the Cloister of Westminster Abbey. This desire to anchor season after season at emblematic places of culture only confirms these links becoming closer and closer between art and fashion.

Michele, backstage, indulging on the collection, confided that « The very beginning of European aesthetics began in Florence, » to which we could of course retort that the Florentine Renaissance art come very much from the Hellenistic era … From this somewhat fantasized vision of Florence we will remember that there’s indeed something unique to the antique, considered today as classic classics. But to dare the comparison between Napa Valley and Florence as he does, we probably would not go so far … We imagine that the enthusiasm of creation taking shape probably exceeded him (…)

« This place is not about the past, it’s like Napa Valley now, with everything happening. » Michele

The Palazzo Pitti, where the show was held, has the particularity that it perfectly illustrates the transition from Middle Ages to Renaissance. Indeed, during Middle Ages, castles were austere buildings built for the self-defense of a territory or a country and the protection of the surrounding population. Once the hundred-year-old war was buried, the next century was spent in the reign of palaces, less utilitarian, but more aesthetic, revealing in another way wealth and power of their owners, where one can see a parallel with these clothes conceived no more for the comfort but for pure aesthetic, ornamentation, comment on oneself to the others, to the world.

Let’s go back to the show. Alessandro Michele’s first ambition was to make the show at the Athenian Parthenon: « In the beginning everything started around the Mediterranean, Greek as well as Roman cultures. » Not having Athens, he turned towards Florence, the city where money and power were prolifique. His quirky and maximalist style could not find a better setting than the Florentine Pitti Palace, where the collection inspired by Italian Renaissance finds the right tone between embroidery, pearls and multiple ornamentation, and frequent reminders of modernity in which his work is written: either WASP polos, bomber of beginning of XX century, block colors, 1960’s printed  (…)

And indeed, during the Renaissance, clothes are often made of velvet or silk, a noble and expensive material. Men of high society wear tights and strawberries, baroque set the tone for suits. Between 1625 and 1670, costume uses imagination and virtuosity: lack of measurement, search for movement, opposition, and freedom. Thus one avoids the cold restraint of Reform and that of the Counter-Reformation: one draws on the profusion of details, in the excess that will go to the preciousness.

Symmetry and balance were no longer appropriate, neither with Michele, who mixes female and male locker rooms, uses and abuses colors by making their possible complementarity, and does not hesitate to associate with noble materials like jogging cotton. Anachronism is authoritative and suggests a form of freedom of your own clutter. « I like popular culture, which is why I particularly enjoy the Renaissance, which I think is very pop. « Pop » means it’s understood by everyone. A. Michele.

This is why, in Baroque, the Gucci silhouette owes its eclecticism, rich of a syncretism peculiar to the one who travels, educates and impregnates himself. The Europeans of the Renaissance were not fully aware of their cultural identity. According to the English historian John Hale, it was at this time that the word europe entered into everyday language and had a frame of reference firmly supported by maps and a set of images asserting its visual and cultural identity.

Crucial element when one realizes that today, one can dress the same way in London as in Milan. Cultural identity of today in Europe is centuries of history homogenized by ways of life that interpenetrate and assimilate from north to south, from west to east, by means of communication that are ours.

Where one could be closed to bad taste, Alessandro had the ingenuity to take a step back with regard to this multiplicity of references all more important than the others ; thus, if the collection as a whole may seem legitimate clutter, in reality it allows to question the idea of taste: if one is at the limit of what can be qualified as bad taste, it’s especially to make the viewer question himself: the less is it the better, the rare is it always beautiful? Which references are mine? Why should I wear today what I hated yesterday?

We are certainly at least as much the legatees of a history of clothing and its codes, as those who impose and claim a new way of apprehending our era. The style of Alessandro Michele is felt from the arrival of first silhouettes, male and female, always ultra-colored (blue, green, orange, red, purple) and rich in patterns, embroidery, and other decorations. The artistic director of the house plays the card of mixtures: genres, materials, prints or ornaments. The collection linked Gucci’s debut to the history of the city. Renowned for its delicacy, lace is the emblem of fashion in Renaissance. This lace jacket embroidered with flowers and leaves, pays tribute to the past while displaying contemporary lines.

The designer continues to explore fauna and flora that he has made – pink roses, pleated dresses, fish on T-shirt … Singer Francesco Bianconi paraded in costume with a tapestry print adorned with red roses. The eccentricity is the order of the day: 1990’s jogging pants worn with a ruffled shirt, burgundy quilted coat, dragon printed on red jacket collar – Chinatown in the 1980’s. Eccentricity, according to Michele, is not an accident but a way of appropriating an epoch and expressing an individuality, to which one could add not to be locked in a trend, a style, but marrying them all, standing out through the mass mode.

As for the rooms, the house offers many flowing, long and colorful dresses that seem to have been designed for goddesses, but also brocade or chiffon dresses, which contrast with mini denim shorts decorated with patterns, leather dresses, or iridescent jogging. Styles that complement each other more than they clash as shown in a set consisting of a vintage jog surmounted by a long quilted pink coat. There’s also the GG Logo used for the first time in the 70’s. The 2018 Cruise collection pays tribute to the origins of Gucci by reintroducing GG motif in ready-to-wear, which contrasts with a rainbow background in harmony with the new aesthetic of the House, and supports this atmosphere of timelessness.

Pieces are marked with Renaissance stamp, this inspiration at the heart of the designer’s creation: the brown mink fur cape – to name only one – has « Venere » embroidery in its pink print silk lining, in reference to the Roman goddess Venus. The palette is lively and dynamic, with a focus on the rose (declined in several harmonies) and gold, of course, very present.

In regards to details, we find many nodes, on ready-to-wear but also on accessories, and flowers, echoing grounds of the collection. The headgear is also presented in numbers, more eccentric than ever, like the laurel crowns that come to dress heads of models, or these hoods entirely covered with pearls. Some models have it with pearl necklaces that surround not their neck but their faces.

« I was thinking of injecting rock ‘n’ roll into the collection, thinking of faces like [Simonetta] Vespucci (Botticelli’s muse, which can be seen on canvas of the four seasons). She was rock’n’roll at the time. A model wore her hair in the style of Venus (painted by Botticelli), pearls and laurel wreaths framed the faces of the models as they entered, dressed in short brocade dress with a turtleneck or a dress chiffon pleated in different shades of pink. « I like pink, it’s very powerful. It makes you feel sweet and sexy, even if you are a man. » Michele

Remains old classical theme, these gilded crowns, these silver tiaras with lyres, leopard turbans, scarves, woolly headbands, rub shoulders with other slightly dull tinted glasses, pearls woven into braids, a certain tribute to the irregular pearl of Baroque. Michele’s italianizing eye for excess and extravagance prowls unhindered through the centuries, psychedelic impressions on tailors to the vestiges of old classic theme, these golden crowns, these silver diadems with lyres, leopard turbans, scarves, woolly headbands, rub shoulders with other glasses tinged somewhat nerdy, pearls woven into the braids of hair, a tribute to the irregular baroque pearl.

This season, he had glittery tights and printed with GG logo, socks, on which we could see impressions of wolf head, symbol borrowed from American Indians by bikers, then reinterpreted here by Michele. Not to mention these slogans : Guccy, Guccification, and Guccify yourself. Like the omnipresent logo, all but unobtrusive, and spun on midi skirts, men’s trousers, as well as bombers and furs, acting as real « hieroglyphs, pop symbols » in Michele’s mind. The ambition of the House is to « Gucchifier ». There’s will to play with codes and to make self-parody, conscious.

What prevents it from falling into a reading first degree is the underlying strangeness: there’s something disturbing, almost of order of the undead, in these silhouettes. Gray-skinned, empty-eyed, they look just like robots men we see in the film « Welcome to Gattaca ». Maybe there are not great political depths, but there’s a subtext that public did not see because they were literally sitting on it. Michele had the lines of « A Song For Bacchus », a poem written in the 15th century by Lorenzo de Medici, embroidered on the seats on which they sat:

Carnival songs by Lorenzo de ‘Medici

How beautiful is the youth: She keeps running away. That, at pleasure, everyone is jubilant,

Nothing is less certain than tomorrow. It’s Bacchus and Ariadne, Fine and burning for each other:

Their happiness is to be together, Time runs away, deceptive. These nymphs and everyone don’t stop being cheerful.

That, at pleasure, everyone is jubilant, Nothing is less certain than tomorrow.

It’s therefore a question of celebrating lives and lives of those men and women who have come before us, and of whom we inherit a part of our culture, before we disappear in our turn. There’s no doubt that this orgiastic character, this desire to see everything to wear before being carried away. Inspired by the Carnival of Florence, where he is accustomed to surrender, Laurent de Medici willingly sacrifices all lyricism to the cheerful tone of most of these ballads.

With this aphorism, inspired by the Medici, Alessandro Michele summed up his Gucci cruises collection, presented Monday evening at the Palatine gallery of the Pitti Palace, which, of course, combined elements dear to the designer – his rich embroidery and decorations, as well as this opulence in both colors and materials, this profusion of codes found exemplified on Elton John, one of his first guests, who wore a dark but glittery jacket sequined with multicolored lizard embroidery on one of the arms, the lizard being the derivative of serpent in azteque symbolism, which has the distinction of being considered a friend of the house, it will be understood that some guests respond to the designer.

Finally, the lucky ones who were invited to the show had the surprise to leave with a box conceived as a souvenir of Florence, a box on which was stamped sheets of nettles, accompanied by a hat of the mark in a bag of jute: « It’s a beautiful box, but you don’t know if it’s a poison, a medicine or a perfume. It comes from New Zealand, and it was the most exotic thing to wear in the Renaissance. It was very rare, but at that time you could find it in Florence, which does not fail to illustrate the richness of this time. « 

It’s in the sublime Palatine Gallery of Pitti Palace that Alessandro Michele chose to scroll through his 2018 cruise collection. The different Gucci silhouettes once again testify the creative folly of the artistic director of the house who manages despite the swirl of materials, colors and influences to confer to the collection a baroque harmony, therefore irregular but not less demanding.

Be that as it may, it should be noted that Alessandro, with the help of his CEO Marco Bizzari, has been able to be clever when it comes to marking a definitive return to Italian crafts, ranging to create workers’ cooperatives specialized in leather goods. Under the leadership of Alessandro Michele, Artistic Director, Gucci has redefined luxury of his House while strengthening its position as one of the most coveted couture Houses in the world, no doubt inspired by the « petites mains » that one found at LVMH and at Chanel. The executive could help, even if the idea of a show in the middle of hangar would have worked, as long as it makes sense.

Michele, both in terms of clothing and meaning given to the collection, has captured the spirit of his time, which hardly wants to be embedded in a style, a movement, but to embrace them all, in a heterogeneous harmony. If at first glance silhouettes appear a little fuzzy in terms, foutraque in sense that we can confer, thinking a little more, we realize that it represents quintessence of our time: profusion difficult to master, rich in symbols and codes that only a specialist can decipher as the whole is intellectualizing to excess.

Not really popular, but polyphonic pop, polysemic and exhilarating. Men and women on the same show, together, as women are no longer avatar – or at least the only avatar – of what one grazes the eye and objects. Feminine and masculine are still less of a kind in sewing, but more problematic measures: shoulder width, curvature of the jacket. In short, we were presented with a controlled overflow, a convincing harmony, from which exhaled an appetite for beautiful anachronism.